Le Velay

Au cœur du massif central, la région placée entre le Puy de Dôme, la Loire, l'Ardèche, la Lozère et le Cantal constitue administrativement la Haute-Loire, mais il ne faut pas voir dans cette dénomination moderne un ensemble d'une unité analogue à celle qui représentait jadis une province.

 

A la vérité, trois " pays " concourent à l'établissement du département créé  à la Révolution française à partir du pays languedocien du Velay, augmenté de parties de l'Auvergne (arrondissement de Brioude), du Gévaudan (canton de Saugues) et du Forez (canton de Bas-en-Basset).

Ils ont chacun leur physionomie propre. Je limite la description au Velay puisque c'est là que les Laffanaire vont vivre et travailler jusqu'à leur migration vers la Loire.

Le Velay est situé entre la chaîne principale des Cévennes, les Boutières, qui le séparent du Vivarais, et les pentes tumultueuses au bas desquelles coule l'Allier. Il est formé de hauts plateaux ponctués de " gardes " coniques ainsi que d'arêtes rocheuses d'aspect étrange, couronnées de ruines féodales, dont les flancs sont creusés par des vallons abrupts, des gorges escarpées, animés par des ruisseaux ou des torrents aux eaux noires. C'est une terre âpre, souvent balayée par les vents, soumise à des étés brefs et torrides succédant à des hivers longs et rigoureux dont l'austérité se tempère par la seule présence de forêts, vestiges honorables de l'épais manteau vert dont le sol était jadis couvert et qui faisait dire qu'un écureuil pouvait aller de Pradelles à Saint-Julien-Chapteuil sans toucher terre. 

  

Le caractère Vellave

 

" Le Vellave de caractère froid et taciturne, s'anime soudain en brusques éclats. Sous son apparence paisible, c'est un violent et un passionné(…) ; l'objet des discussions est (…) une question d'intérêts (...)  l'amour propre, la violence cachée du caractère sont les causes profondes. (…)  Ils sont plus irascibles qu'à proprement parler froidement vindicatifs. L'ivresse accroît souvent ces fureurs, elle est fréquente dans ces montagnes au dur climat (…) physiquement ils portent le vin à merveille et gardent leur force. Sous son calme le Vellave (…) est aussi un imaginatif, un rêveur facile à tromper, difficile à conseiller : il croit volontiers ce qui flatte ses espoirs et ses désirs, et n'écoute qu'avec peine les avis pessimistes.

Dans les rapports sociaux, il a une fierté, un sens de son droit qui tourne trop souvent à la susceptibilité et à l'arrogance ; il est volontiers forte tête et vous bousculera dans une rue de vingt mètres pour montrer qu'il ne se laisse pas marcher sur les pieds ; le connaissez-vous, il sera serviable, aimable et complaisant et, si vous êtes son ami, dévoué, sûr et fidèle. Il est de même hospitalier (…) mais il ne faut pas qu'il croie qu'on veut profiter de son hospitalité pour faire quelque économie….

Ordinairement peu bavard, le Vellave, quand il s'anime, devient grand parleur, grand conteur et bon hâbleur ; il observe bien, aussi a-t-il des remarques d'un esprit un peu gros, mais très juste et parfois même d'une justesse cruelle… Il y a dans cet homme quelque chose du Méridional, maté seulement par quatre mois d'hiver et de neige (…). Mais où le Vellave se distingue tout à fait du Méridional, c'est qu'il n'a pas la faculté d'assimilation rapide et encore bien moins la faculté d'oubli facile ; ceci est capital, il prend tout, même la plaisanterie, au sérieux. N'omettons pas d'indiquer que les utopies, même les plus généreuses, n'ont aucun crédit auprès de lui ; son instinct se révolte, son bon sens et ses habitudes résistent. Attaché à une terre qu'un labeur incessant a rendu féconde, le Vellave, presque toujours possesseur d'un lopin et d'une maisonnette, n'aime point le "partageux". Non pas que, malgré ses répugnances ataviques, répugnances faites d'égoïsme, il soit insensible aux doctrines de coopération et de mutualité ; elles s'accordent assez avec ses principes d'épargne et d'assurance, elles sont dans le sens de ses pratiques. "

 

 

 

Tence

Le canton de Tence est animé par la fabrication des draps ou serges faits au Mazet  Saint-Voy et au Chambon, avec des laines mécaniquement cardées et filées. Ces  communes fournissent la laine en suint*  aux fabriques de l'hôpital général du Puy. Une autre branche de l'industrie sur cette localité consiste en la confection des toiles blanches et bises : les premières  se vendent à la classe bourgeoise du pays ; les secondes sont exportées à Saint-Etienne. Enfin, le pays, très boisé, fournit une grande quantité de planches, qui sont conduites sur les bords du Rhône. L'agriculture, elle est un peu sacrifiée à l'activité industrielle : la moitié des terres à peine s'ensemence en seigle : l'autre moitié est cultivée en alternance.

 

Aux confins du Vivarais et du Velay, dans une région de moyenne montagne située entre les vallées du Rhône et de la Loire, Tence est d'origine ancienne. Elle s'est développée autour d'un prieuré. La ville, à environ 20 km d'Yssingeaux,  s'étend sur un plateau d'une altitude moyenne de 1 000 mètres.

Depuis le milieu du XVIème siècle, l'histoire de la contrée est marquée par la Réforme qui s'est profondément ancrée sur ces hautes terres. Les deux cantons sont jalonnés de temples, de maisons d'assemblées protestantes, d'églises, de chapelles et de maisons de béates* qui témoignent de la diversité des pratiques religieuses des communautés protestantes et catholiques. 

 

Dans cette région rurale, où l'élevage et la sylviculture ont remplacé la polyculture, l'architecture est remarquablement conservée et de nombreuses fermes datent des XVIIème et XVIIIème siècles. Les cours d'eau qui sillonnent la région ont permis de développer un artisanat et une petite industrie utilisant la force hydraulique. Aux traditionnels moulins à farine et scieries se sont ajoutés des papeteries établies sur le Lignon et des moulinages de soie sur le ruisseau de Trifoulous.